Longtemps qu’elle m’intriguait, que j’avais envie de la lire : Françoise Rey, celle qui fut à la fois prof de français et écrivaine de l’érotisme, le tout sans pseudonyme – j’admire cette audace. J’ai fini, ce matin, son premier roman, La Femme de papier.
Lettre après lettre, la narratrice – qu’on est tenté de confondre avec l’auteure – écrit à son amant, lui rappelle leurs étreintes. D’histoire, il n’y en a pas, ou presque. Il s’agit plutôt d’une exploration de l’érotisme, page après page.
Et il faut se rendre à l’évidence : chez Françoise Rey, tout est érotique : les hommes, les femmes, les androgynes, les jeunes et les vieux, les animaux, les objets. Parfois, j’ai été émue, parfois je n’y ai pas cru – rarement. Plus souvent, j’ai été choquée, voire même horrifiée (une histoire de stylos). Le passage de l’accouchement est à la fois féroce et drôle, surréaliste mais crédible. L’écriture est toujours très belle, vivante et imagée.
Les deux amants osent tout, ne s’interdisant que les sentiments qui affleurent pourtant à chaque étreinte. Malgré cela, ou peut-être à cause de cela, ces lettres aboutissent, inévitablement, à une déclaration d’amour :
« Fais ta place, mon amour, trace ton chemin en moi, je te sens palpiter dans mon sexe comme un oiseau captif, un oiseau très chaud, très vivant, ébloui du piège où il vient de tomber. Je te garderai, je deviendrai ta cage, ta prison de chair et de sang, tous les mots que je prononce tisseront autour de toi une toile où tu ne sauras plus te débattre. Perce de ton dard un tunnel en moi, un tunnel où tu voudrais t’engouffrer toujours et dont la frontière t’enivre… »
En fermant ce livre, une seule certitude : il n’y a pas de frontière entre l’érotisme et la pornographie. Sauf peut-être dans l’esprit des censeurs.
Le livre est publié aux éditions Pocket.
J’ai découvert au moment de sa sortie cet ouvrage par l’intermédiaire d’un extrait paru, si ma mémoire est bonne dans le magazine Elle. Il était question de téléphone (le premier récit – je m’en remets une fois de plus à ma mémoire vacillante), cela m’avait plu, je l’avais offert à ma femme, grande lectrice devant l’Éternel, mais pourtant rétive à ce pan singulier de la littérature (et des préoccupations humaines, plus généralement) qu’est l’Érotisme (oui, avec une majuscule, comme à Éternel – j’aime le culte).
Ça ne lui avait pas plu.
Je ne me souviens plus beaucoup de l’ouvrage, mais deux histoires me sont restées en tête. Celle du téléphone, et celle qui, comme vous, m’avait fait froncer les sourcils, évoquée ci-dessus.
Pas un livre d’elle que je n’ai pas lu. Françoise Rey est celle qui m’a donné le goût de la littérature érotique. A découvrir si ce n’est pas déjà fait.