La première fois que je l’ai lu, j’étais dans le fond d’un canapé rouge, toute cassée. J’y restais toute la journée, allongée, parce que je ne pouvais pas m’asseoir. Je ne souffrais pas beaucoup, mais je m’ennuyais terriblement. Du coup, je m’accrochais aux livres qu’on m’avait donnés comme à des bouées de sauvetage. Parmi ceux que ma tante m’avait laissés, il y avait Le choeur des femmes, de Martin Winckler.
C’est un pavé. Je l’ai pris le matin, et je ne l’ai plus lâché, fascinée par toutes ces voix de patientes qui parlaient de leurs maux. Fascinée qu’on donne enfin voix – et voie – à toutes ces questions de femmes que nous sommes censées taire, petits et grands mystères de la gynécologie.
Pour vous présenter la narratrice, l’insupportable et attachante Jean Atwood, je lui laisse la parole :
« Je m’appelle Jean Atwood. Je suis interne des hôpitaux et major de ma promo. Je me destine à la chirurgie gynécologique. Je vise un poste de chef de clinique dans le meilleur service de France. Mais on m’oblige, au préalable, à passer six mois dans une minuscule unité de «Médecine de La Femme», dirigée par un barbu mal dégrossi qui n’est même pas gynécologue, mais généraliste! S’il s’imagine que je vais passer six mois à son service, il se trompe lourdement. Qu’est-ce qu’il croit? Qu’il va m’enseigner mon métier? »
Le soir, j’avais fini le roman et je me sentais étrangement proche de ses personnages et de son auteur. La fin m’a fait penser au dénouement d’une comédie de Molière, à la fois invraisemblable et indispensable, mais je n’en dis pas plus.
Quoi qu’il en soit, ce roman est également extrêmement utile, parce qu’on y apprend une foule de choses sur la gynécologie et notamment sur la contraception. Dans ce blog où je cause constamment d’érotisme, il fallait bien que j’en parle un jour. Vous pouvez vous rendre sur le site de Martin Winckler, vous y apprendrez tout ce que vous avez besoin de savoir sur le sujet, au point d’en savoir parfois plus que votre médecin.
Si vous êtes comme moi et que vous repérez un jour une erreur dans le discours de votre généraliste – ou pire, de votre gynécologue – vous le regarderez en pensant très fort « Toi, mon coco/ma cocotte, faudrait que tu révises », mais vous n’oserez pas le dire. Je me demande s’ils perçoivent, tout de même, quelque chose de nos pensées…
Enfin, vous pouvez en ce moment écouter sur France Culture La maladie de Sachs, roman qui évoque le quotidien d’un généraliste, et qui a été transformé en feuilletons pour la radio. Le livre s’y prête parfaitement : on entend les voix des patients, du médecin, de sa secrétaire… Les épisodes sont parfois drôles, souvent émouvants. C’est tous les soirs, à 20h30, et le premier épisode date du lundi 17 février.
Vous avez compris, j’aime beaucoup.
Le choeur des femmes et La maladie de Sachs sont publiés aux éditions P.O.L. et en folio.