C’était en Grèce. Cherchant la solitude, j’étais allé me perdre dans l’île la plus lointaine. Tous les matins, je gagnais la plage, et, nu comme au premier jour, je renaissais entre les vagues. Le plaisir de fendre la mer me semblait toujours neuf ; je nageais des heures durant. J’avais découvert, à une centaine de mètres de la côte, un large rocher dont la pierre chauffée par le soleil m’accueillait entre deux baignades. C’était, au sein de la mer, un petit morceau de terre.
Je m’étais endormi, je crois. Au réveil, elle était là. Penchée sur moi, sa chevelure constellée d’eau pleuvant sur ma poitrine.
Je ne pus la voir, d’abord. Elle m’éclaboussait de soleil. Puis, son visage se dessina dans l’ombre, et je sus son regard, le rouge de sa bouche, la perfection de sa nudité.
Était-elle fille, femme ou sirène ? Elle ne dit pas un mot, mais ses yeux me parlaient. Ils me donnèrent l’ordre de l’embrasser. Nous roulâmes ensemble sur le chaud de la roche, nos bouches fondues, son corps humide contre le mien.
Elle était belle comme seuls les songes savent l’être, les cheveux épars sur la pierre, les yeux fermés, abandonnée.
La pointe de son sein ressemblait à une perle brune ; je la mordis, et ce fut son premier soupir.
Je descendis encore, parcourant de baisers son ventre salé, avide de la goûter.
Son sexe était un coquillage ouvert, dentelles de chairs laiteuses fendues en deux. J’y glissai la langue. Elle avait le goût et l’odeur de la mer. Je m’y enfonçais, assouvissant ma soif. Elle fut en cadence avec moi, ses soupirs crescendo, et je sentis sa chair palpiter contre mes lèvres.
Quand je me redressai, heureux, elle eut un sourire, se retourna, et, d’un seul mouvement, elle regagna la mer.
Ébahi, je la regardai disparaître. Seules traces de son passage : un rideau d’écume sur la mer, et trois gouttes de sperme sur la roche.
Retrouvant mes esprits, je voulus la poursuivre. Mes efforts furent inutiles. Les vagues avaient protégé sa fuite.
Les jours qui suivirent, je la cherchai partout. Sur l’île, sur la plage, dans la mer.
En vain.
Depuis, je n’ai cessé de la rêver.
J’ai également écrit une version longue de cette nouvelle ; elle est parue dans le recueil « Charmes », aux éditions L’ivre-book. Vous pouvez acheter le recueil ici sur le site de L’ivre-Book, ou ici sur Amazon.
Cette sirène est très troublante…Où a été prise la photo?
En Croatie !