Voltaire dans les buissons

Voltaire aimait les personnages naïfs. Des personnages dépourvus de cette ironie que lui ne pouvait réfréner. Souvent, dans ses récits, c’est la femme qui séduit l’homme, comme la belle Cunégonde :

Un jour Cunégonde, en se promenant auprès du château, dans le petit bois qu’on appelait parc, vit entre des broussailles le docteur Pangloss qui donnait une leçon de physique expérimentale à la femme de chambre de sa mère, petite brune très jolie et très docile. Comme mademoiselle Cunégonde avait beaucoup de disposition pour les sciences, elle observa, sans souffler, les expériences réitérées dont elle fut témoin ; elle vit clairement la raison suffisante du docteur, les effets et les causes, et s’en retourna tout agitée, toute pensive, toute remplie du désir d’être savante, songeant qu’elle pourrait bien être la raison suffisante du jeune Candide, qui pouvait aussi être la sienne.

De retour dans le château, Cunégonde laisse tomber son mouchoir aux pieds de Candide. Il le ramasse, leurs doigts s’effleurent. Conclusion : « leurs bouches se rencontrèrent, leurs yeux s’enflammèrent, leurs genoux tremblèrent, leurs mains s’égarèrent ».

Voltaire, comme ses personnages, avait le tempérament ardent. Émilie du Châtelet, femme de lettres et de sciences, laissa-t-elle tomber pour lui son mouchoir ? Toujours est-il qu’elle fut sa maîtresse. La belle avait douze ans de moins que lui, et de l’intelligence à revendre. Cette liaison orageuse fut probablement son grand amour.

Mais il n’avait pas pour autant joué sa dernière carte. Après avoir aimé passionnément Madame du Châtelet, Voltaire tomba sous le charme de sa propre nièce, Mme Denis. Ils vécurent des jours heureux dans sa propriété de Ferney.

Il faut cultiver son jardin : pas un buisson ne lui résista.